Le livre aborde l’impact des intangibles autant de façon macroéconomique, l’implication financière pour les entreprises et l’impact comptable de ces actifs. En comptabilité, un intangible peut être une marque de commerce, des relations clients, un logiciel ou un goodwill (qui est le résultat d’une acquisition) pour nommer que ceux-là. Il s’agit d’un livre incroyablement intéressant pour une personne comme moi qui a un pied dans les trois domaines.
Les auteurs
Jonathan Haskel est professeur d’économie et a travaillé sur l’intégration des intangibles au PIB pour des entités gouvernementales britanniques. Il s’est assurément concentré à l’écriture des sections économiques.
Stian Westlake est fellow au Nesta, une fondation nationale britannique pour l’innovation et il est conseiller au ministère britannique des sciences, innovations et universités. Il s’est fort probablement occupé d’écrire l’impact des intangibles pour les entreprises.
Les 4 « S »
Les auteurs définissent 4 grandes particularités des intangibles.
Scalability (économie d’échelle): Les actifs intangibles sont « scalable », produire une unité de plus génère très peu de coûts supplémentaires. On peut penser à une écoute Spotify, vendre un système d’opération Windows ou vendre un coke de plus grâce à sa marque de commerce.
Sunknest (des coûts irrécupérables): Si la compagnie fait faillite, très peu d’intangibles peuvent être vendus. Cela rend les intangibles plus risqués. De plus, cela peut grandement limiter le financement par dette d’une entreprise qui en développe beaucoup, car elle a peu d’actifs tangibles qu’elle peut utiliser pour se financer.
Spillovers (retombés): Les intangibles ont tendance à générer des retombés pour la firme, mais pas qu’à elle. Par exemple, le design de l’Iphone a eu un impact sur les compétiteurs: ils ont adopté un design similaire. Empêcher des concurrents d’utiliser nos machines est relativement facile. Si quelqu’un fait intrusion dans votre usine, vous pouvez appeler la police. Par contre, la protection de vos méthodes de travail qui est le résultat de recherche peut être une tâche beaucoup plus ardue. On pourrait aussi dire que l’entrainement de nos employés génèrent des retombés. Si l’employé quitte, l’argent dépensé par la firme est perdu pour celle-ci, mais l’intangible existe toujours, la connaissance reste détenue par l’employé. Même si celui-ci quitte, cela aura des retombés chez les compétiteurs.
Synergies: Les intangibles sont des actifs avec de grandes économies d’échelle qui peuvent facilement s’intégrer à d’autres intangibles. Par exemple, l’algorithme de Google pourrait certainement débloquer une tonne d’innovation dans d’autres entreprises si celle-ci était disponible. On peut penser à Amazon avec sa chaîne d’approvisionnement, l’environnement Apple ou Android qui ne vie que grâce à une tonne d’applications, les connaissances en informatique, génie électrique et en santé pour bâtir un appareil médical. Bref, les exemples sont nombreux. Les actifs tangibles ont aussi des synergies, mais elles n’égalent pas l’ampleur des actifs intangibles.
La montée des intangibles et la pertinence de la quantité de capital dans l’évaluation d’une entreprise
Le price-to-book, c’est le prix qu’un investisseur est prêt à payer une entreprise par rapport à sa valeur comptable. De plus en plus, certains mettent en doute la pertinence de ce ratio pour évaluer une compagnie à cause des intangibles. Dépendamment comment la compagnie génère ses intangibles, la transaction comptable ne sera pas la même et parfois on peut sous-estimer grandement la valeur comptable de celle-ci, car ces intangibles ne seront pas enregistrés au bilan. Lorsque l’on y pense, les investisseurs ont toujours évalué les intangibles sans s’en rendre compte. Tout le monde peut acheter des machines, ce n’est pas ça l’élément important, c’est la façon dont on les utilise.
De ma compréhension, les intangibles peuvent générer une cassure au niveau des intrants (input) et la production (output). Le capital est un intrant classique. Par exemple, effectuer de la recherche et développement (une dépense en capital) peut générer plus de valeur que le coût encouru. Si vous dépensez 100M$ et vous trouvez un remède pour tous les cancers, je peux vous garantir que vous allez réaliser des gains supérieurs à 100M$. La quantité de capital et la production sont potentiellement déconnectées.
La logique se tient aussi avec le travail qui est le deuxième intrant classique chez les économistes. Pourquoi payons-nous 400$/h pour un fiscaliste comparativement à 80-90$/h pour un garagiste? On parle de deux humains avec des capacités physiques potentiellement similaires. On pourrait dire que la personne à 400$/h possède davantage d’intangibles de valeur. Ces connaissances ont une économie d’échelle. Le fiscaliste qui rencontre 2 clients ou 200 avec un certain problème n’a pas besoin d’effectuer davantage de recherche. Par contre, du moment que celui-ci change de domaine, pour aller en santé par exemple, tout le temps qu’il a étudié les lois fiscales est d’aucune utilité. Il est difficile de vendre les connaissances séparément de la personne. Malgré que ces intangibles aient une très grande valeur, il est le seul à réellement pouvoir les utiliser.
J’ai utilisé l’exemple d’un fiscaliste, mais on pourrait dire la même chose d’un employé qui connaît tous les systèmes et procédures de son employeur. L’employé possède des intangibles de valeur qui sont pertinents exclusivement chez son employeur actuel. Alors que l’on prône une forte rotation de l’emploi pour maximiser le revenu de l’employé, on peut questionner sa pertinence dans certains cas. Peut-être que les compétences développées sont uniquement pertinentes chez l’employeur actuel. Dans cette situation, nous faisons fasse à ce que l’on appelle en économie un dilemme du prisonnier. Les intervenants ont intérêts à coopérer pour le bien commun qui est représenté ici par la rétention des intangibles par l’employeur et la maximisation du salaire par l’employé. Toutefois, si la coopération n’est pas établie, le résultat pourrait être négatif pour les deux partis: l’employé quitte ce qui diminue son salaire, car une grande partie de sa valeur était attribuée aux intangibles seulement pertinents chez son employeur actuel et diminution des intangibles disponibles par l’employeur.
Appréciation du livre
j’ai adoré la lecture. J’avais un peu la même excitation que quand j’ai lu The Psychology of Money de Morgan Housel parce que j’aimais beaucoup le sujet, mais le fait que le livre était bien plus technique a comblé mon côté analytique là où The Psychology of Money a raté la cible. C’est un contenu technique, mais je considère qu’il n’est pas assommant…en tout cas, la plupart du temps! C’est un sujet que je m’intéressais de plus en plus. C’est venu répondre à certaines de mes interrogations. Parfois, le moment que l’on lit un livre est important. C’est comme la musique. Parfois, ce n’est pas que la musique est meilleure, c’est simplement qu’elle répond à nos besoins actuels. Le fait d’avoir le point de vue de l’économiste et du financier a été le comble pour moi. On peut dire que la combinaison des connaissances des deux auteurs a créé….de la synergie 😉
Qui devrait lire le livre?
Les économistes, les gens travaillant de près ou de loin à l’évaluation d’entreprises et les entrepreneurs.
Je fais une mise en garde. Le sujet pourrait être très lourd pour ceux qui n’ont pas une formation dans au moins l’une de ces disciplines: économie, finance ou comptabilité.
Le journal d’un investisseur
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