Mes commentaires sur Heure des choix : Face à l’urgence climatique et sociale par Gérald Fillion et François Delorme

Heure des choix s’attaque à deux grands thèmes: l’environnement et les inégalités. Il y a plusieurs éléments qui seraient intéressants à soulever, mais j’aborderai uniquement l’environnement sous l’angle des voitures électriques et les inégalités sous l’angle de la technologie.

Les auteurs

Gérald Fillion est journaliste économique à Radio-Canada, figure bien connue au Québec. il anime Zone économie, anciennement RDI économie, où il discute des enjeux économiques de la semaine.

François Delorme est chargé de cours en économie à l’Université de Sherbrooke, ancien économiste de la fonction publique fédérale et chercheur pour divers organismes dont le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) et le laboratoire contre les inégalités mondiales sous la direction de l’économiste français Thomas Piketty.

Le fait que je veuille lire ce livre n’est pas un hasard. François m’a enseigné 2 cours en 2016.

Le livre est séparé selon les auteurs. On va indiquer au début du chapitre si celui-ci a été écrit par Gérald Fillion ou par François Delorme. Gérald tend à introduire un sujet alors que François Delorme conclut avec son avis d’expert.

L’environnement et la voiture électrique

Le livre explique que, selon les auteurs, l’urgence climatique et sociale sont liées. Il est facilement démontrable que les plus fortunés dégagent plus de Co2 que l’individu moyen. De l’autre côté, les changements climatiques affectent plus injustement les moins nantis. On a le début d’un cercle vicieux.

Un angle présenté pour améliorer notre bilan environnemental est la voiture électrique. Même si on souligne qu’une voiture électrique au Québec génère 65% moins d’émissions qu’une voiture à essence lors d’un cycle complet de 150K km et même 80% moins sur un cycle de 300K km, on ne pense pas qu’il s’agisse de la grande solution. La voiture continue de créer des bouchons de circulation qui sont couteux économiquement et environnementalement parlant et qui favorise l’étalement urbain. La seconde raison est que ce changement risque d’être trop long à s’opérer. Aujourd’hui, 3% des voitures sont électriques et on prévoit 30% en 2030. Trop peu trop tard selon François Delorme. Je suis assez d’accord. Les voitures électriques sont un pas vers la bonne direction, mais pas le Saint Graal pour autant. On ne peut pas s’en tenir qu’à ça.

On parle aussi de la bourse du carbone qui peut venir affecter le prix de l’essence, mais pas que. L’économiste en moi est un grand plus fan de la bourse du carbone. Réglons une bévue de marché, le fait de ne pas considérer les émissions polluantes dans le coût de création d’un bien, par le marché. Faisons payer les pollueurs… utilisateurs-payeurs! Le problème, qui est aussi mentionné dans le livre, est que les riches peuvent payer plus. Ce n’est pas pour rien qu’ajouter une taxe sur l’essence a attiré beaucoup de controverses en France avec les gilets jaunes. La famille qui possède 5M$ d’actif net ne s’empêchera pas de voyager pour 20 sous de plus sur l’essence. Les moins nantis qui sont déjà serrés eux payeront le prix fort alors que c’est eux qui polluent le moins. Par contre, je pense qu’on pourrait mitiger ces effets en augmentant les transferts aux moins nantis. Dans une même proposition, on augmente de façon disproportionnée les transferts pour être certain que personne doute que ce transfert soit plus élevé que le coût supplémentaire du carbone et on augmente le prix du carbone. De mon point de vue, tarifier le carbone ou une taxe sur le carbone est ultimement une excellente solution. J’irais jusqu’à dire LA solution. Dans le livre, on semble beaucoup moins convaincu que moi. Le prix de l’essence à 2$-2.50$ ça fait mal, mais changer des habitudes ne se fait pas sans inconforts.

Les inégalités et la technologie

Le sujet de la technologie est venu me chercher comme je travaille pour une Fintech. L’intelligence artificiel (IA), c’est quelque chose qu’on utilise par moment chez Inovestor. Une IA bien ficelée dans un contexte spécifique, ça peut faire des miracles en termes de productivité.

François Delorme explique que certains économistes ne sont pas d’accord sur l’impact de la technologie sur les emplois. À mon avis, il est important ne pas mettre toutes les innovations technologiques dans le même panier. On peut penser à des caissiers qui gèrent maintenant 6 caisses plutôt qu’une. C’est une augmentation de productivité significative, une baisse d’emploi globale et une stagnation du salaire (on reste autour du salaire minimum). Je pense qu’ici le point à retenir est que le caissier n’est pas plus qualifié donc il gagne le même salaire. L’employeur met le gain de productivité dans sa poche ou si l’on est dans une industrie compétitive, les prix chutent à moyen terme. Dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre, les employés sont redéployés pour remplir les tablettes par exemple. Les innovations technologiques qui sont positives pour l’employé sont probablement lorsqu’elles poussent à la spécialisation. On a besoin de moins de gens, mais davantage de gens spécialisés qui sont davantage rémunérés, car ils sont plus difficiles à remplacer/former. Dans ce contexte, pour profiter de l’avantage de l’avancement technologique, on doit le partager avec l’employé.

Sans surprise, je suis fortement en faveur des avancées technologiques. La société d’aujourd’hui ne s’est pas construite en stagnant bien au contraire. On a eu le même réflexe lors de l’industrialisation en disant que cela allait détruire des emplois. La réalité d’aujourd’hui est que beaucoup d’emplois à risque sont ennuyants, mal rémunérés et sont de plus en plus difficile à combler. En d’autres mots, on détruit des emplois que personne ne veut. Un autre aspect important est que ces gens peuvent être redéployés dans d’autres secteurs facilement parce qu’ils sont, en général, peu spécialisés. Le coût de la réaffectation, c’est-à-dire la perte des compétences acquises lors de l’emploi et qui sont uniquement utiles dans ce type d’emploi, est relativement faible. J’y vois globalement un effet positif. Avec le vieillissement de la population, la technologie est la solution la plus séduisante à mes yeux.

Les inégalités dans une économie de marché

De mon point de vue, les inégalités dans un système capitaliste sont inévitables. Le rendement sur le capital est supérieur à la croissance des salaires comme l’a mentionné Thomas Piketty dans son livre le capital. Ainsi, le capitaliste (l’investisseur) sera gagnant sur le salarié à long terme. C’est mathématique, la puissance des intérêts composés à l’oeuvre.

Dans le monde comme le notre, les inégalités sont partiellement créées par le progrès et cela crée un feu de paille avec la globalisation. Certains entrepreneurs deviennent très riches, car ils révolutionnent tout un système. Pas simplement de leur pays, mais bien de la planète. Netflix, Facebook, Google, Amazon, Apple ou Microsoft ont des tentacules partout. Tentez de ne pas utilisez leurs services ne serait-ce qu’une journée. Dites-vous que toute la planète est dans la même situation que vous. Avec la globalisation, est-ce que le 1% ou 0.1% deviennent trop puissants?

Pour le top 10%, c’est encore une fois l’avancement technologique qui crée ces inégalités. Les employeurs ont besoin plus en plus de gens spécialisés pour gérer ces technologies. 10 employés sont peut-être remplacés par 2 personnes davantage qualifiées avec des salaires plus élevés. Ces personnes récoltent les fruits de l’avancement technologique. Cette « inégalité d’emploi » se transforme rapidement en différence de capital qui est investi dans les marchés ce qui accentue encore plus les inégalités.

Si on suit la logique des deux derniers paragraphes, qui fait croître le PIB de façon disproportionnée? Probablement ces catégories de personnes, car elles augmentent la productivité. On prend souvent l’exemple d’un PIB de 100$ dont une personne génère 99.10$ et que les neufs autres personnes génèrent 0.1$ avec le commentaire: « voulons-nous vivre dans une société comme celle-ci? » On pourrait prendre l’exemple à l’envers et se demander si on veut une société ou tout le monde génère que 0.10$. On se doute que la réponse adéquate est entre les deux. Avoir une personne à 50$, puis les autres à 5.56$ serait un avancement significatif. On a augmenté le bien-être de tous grâce à l’augmentation de la productivité. C’est probablement ce qu’on entend dans le livre lorsque l’on parle de croissance inclusive et dont je suis tout à fait d’accord avec les fondements.

Par contre, si on regarde la richesse relative, on a aussi augmenté les inégalités dans l’économie de façon considérable. Pointer uniquement les inégalités n’est pas suffisant selon moi, car l’innovation en crée, mais ce n’est pas pour autant qu’on veut l’éliminer.

Combien devrait générer la personne qui a augmenté la productivité? 90$? 20$? 47.54$? L’intensité de cette redistribution, c’est le gouvernement, donc implicitement les électeurs, qui le décide. Les pays scandinaves et les États-Unis sont des exemples que les deux systèmes peuvent exister. Il suffit que la population soit en accord avec ce système.

Conclusion

On se sent découragé dès la moitié du livre en se disant que les changements climatiques sont enclenchés et que nous sommes trop lents à agir. Malheureusement, les enjeux environnementaux sont planétaires. Certes, il y a des pays plus avancés que d’autre sur cette question, mais, au final, on partage la même planète. On gagne et on perd en équipe.

Le résultat est relativement positif pour les inégalités au Québec. Loin d’être parfait, mais mieux qu’au Canada et aux États-Unis bien souvent. Quand on se compare, on se console. Pour moi, le livre est davantage un cri du coeur climatique que social avec les constats qu’on apporte au fil de la lecture.

Qui devrait lire le livre?

Tout le monde. Vous n’avez pas besoin de formation en particulier. Si le sujet vous intéresse ou que vous êtes intrigués, lancez-vous.

Le journal d’un investisseur
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Un commentaire sur “Mes commentaires sur Heure des choix : Face à l’urgence climatique et sociale par Gérald Fillion et François Delorme

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  1. Les expressions anglaises sont-elles vraiment incontournables, ou les uilise-t-on principalement pour « valider » sa compétence ?

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